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Bientôt 25 ans de cette nouvelle vie, c’est dire que ce ne fut pas facile, il y a 50 ans que j’ai osé franchir le premier pas, oser parler à un médecin de ce mal être qui me tiraillait depuis si longtemps.
On évoquait le Maroc pour l’opération, la prostitution pour survivre.
« Mariez-vous, ça passera, m’avait-il dit à l’époque ! »
J’étais classée dans les pervers.
Je me suis marié(e) à 26 ans, à l’époque on parlait de moi, je parlais de moi au masculin pour paraître normal(e).
Le mariage m’a apporté(e) une forme d’équilibre pendant quelques années, une épouse qui était déjà accro aux antidépresseurs, qui ne souhaitait plus travailler pour élever « mes » enfants quand il était temps de montrer le bulletin de paie mensuel, « ses » enfants lorsqu’il s’agissait d’éducation.
Bien sûr, je me faisais exploiter au travail, parce qu’il m’arrivait de faire des heures supplémentaires, bien sûr il était courant et normal de ne pas avoir de repas le soir en rentrant tard du travail, Madame élevait « mes » enfants et n’avait pas eu le temps d’aller chercher du pain, la boulangerie était à 200 m.
Le déséquilibre s’est réinstallé, l’alcool pour oublier, j’ai d’ailleurs oublié ce que je devais oublier, sauf de boire.
Ça s’est terminé en divorce, vivre seule, continuer de picoler et porter ces vêtements interdits, l’alcool me désinhibant.
Tiens, notre locataire a trouvé une copine, me dira un jour ma propriétaire !
J’ai toujours fait face à mes obligations financières définies par le jugement de divorce et les révisions apportées.
Le courage de rencontrer un médecin, plusieurs médecins se disant impuissants à intervenir dans le cours de ma vie.
En 1993, j’ai pris une décision importante, réussir ma « conversion » et pour cela, ne plus toucher une goutte d’alcool, ce que j’ai fait, 29 ans sans alcool et ça ne me manque absolument pas !
À force de chercher, j’ai fini par trouver une équipe prête à me prendre en charge, d’abord ce suivi psychiatrique de près de trois ans, avec de temps en temps une visite près de l’endocrinologue qui me répétait sans cesse qu’il lui fallait l’accord du psy pour commencer dans un premier temps l’Androcur, quel bonheur, puis le traitement hormonal. Enfin une vie apaisée !
Un patron qui ne voulait plus me faire travailler, que mes clients me voient, j’étais commerciale, qui m’a supprimé la voiture de fonction, payée pour rester au bureau à ne strictement rien faire sinon écouter la radio et qui me remboursait les repas au restaurant chaque midi. Pendant que je mangeais, on fouillait mon bureau, peut-être pour y trouver un motif de licenciement, puis il a fini par invoquer la cause économique et me payer les six mois de préavis à rester chez moi.
1997, j’ai obtenu l’accord pour l’intervention en Belgique, 3 mois d’attente et je suis partie seule en voiture avec une ceinture porte billets contenant la somme nécessaire pour l’opération et l’hébergement à l’hôtel.
En Belgique, on avait droit à la pompe à morphine, interdite à cette époque en France, je dois avouer ne pas l’avoir trop utilisée, je n’avais pas spécialement mal au point de m’en servir.
La visite de Bruxelles une fois sortie de la clinique en attendant le feu vert du chirurgien pour rentrer en France, de très bons souvenirs que je n’ai que rarement partagés.
Plus tard, j’ai fait 600 km seule en voiture pour rentrer chez moi, je crois que ça a été la période la plus douloureuse et la plus fatigante de ma nouvelle vie.
La vie d’après, problème pour trouver du travail :
« Vous vous appeliez comment avant ? »
Pas de carte de sécurité sociale avec un 2, non, un numéro provisoire commençant par 8 attribué par la CPAM locale.
Une formation ?
J’avais expliqué mon parcours :
« Compte tenu de votre situation vous ne pourrez pas accéder à cette formation qu’ils m’ont écrit ! »
J’ai remué ciel et terre et j’ai fait cette formation.
Changement d’état-civil avec cette justice qui prenait tout son temps, pour le bonheur de mes avocats, des expertises qu’il faut payer, un expert gynécologue qui à mes frais, palpe, mesure et dessine un portrait de mon nouvel appareil « génital », c’est vrai qu’il dessinait bien.
4 ans après j’ai eu ma carte vitale, une carte d’identité conforme avec la mention sexe féminin.
Bien sûr, il me fallait rencontrer des médecins, de nouveaux médecins, (pour cause de changement de région), passer de Nantes à Grenoble, certains de ces médecins, dignes de leur profession, d’autres…
Comme celui qui m’établit une ordonnance au nom de Monsieur suivi de mon prénom féminin, ou encore celui qui m’arrache littéralement le soutien-gorge tout en me disant :
« Vous permettez, je n’ai jamais vu les effets des hormones sur un homme tout en m’appelant Madame. »
Bref, le temps a passé, les enfants ont grandi se sont mis en couple ils ont eu des enfants.
J’ai fait la connaissance de leurs beaux parents, ils ont eu l’air de m’accepter, seulement l’air.
Ce qui me pose problème c’est le beau père, un proviseur à la retraite, qui me propose à plusieurs reprise de me déguiser en père Noël, je tente de lui expliquer que c’est impossible pour moi, de reprendre une quelconque apparence masculine, il écoute mais n’entend pas ce que je lui dis.
Quelques semaines plus tard je m’aperçois que mon fils, (ça ne luit était jamais arrivé en plus de vingt ans), sa femme, les beaux parents parlent de moi exclusivement au masculin, même en ma présence.
Je leur ai fait savoir à plusieurs reprises et avec véhémence que mon genre est irrémédiablement féminin. Rien n’y a fait.
Qu’ont-ils à gagner en procédant ainsi, sinon créer une situation conflictuelle.
Un jour j’apprends de la bouche de mon fils qu’un baptême est prévu, mon fils a envie de faire la fête et plutôt brutalement que je ne suis pas sur la liste des quelques 60 invités.
Interdite de réunions de famille ! Je vais devoir me battre pour voir mon petit-fils qui me manque.
Les raisons invoquées, la présence de mon ex, incapable de prononcer mon prénom officiel, les difficultés rencontrées avec ses beaux parents concernant mon genre officiel, les amis de mon fils qui ne sont pas au courant, etc. Je peux être présente si vraiment je le souhaite mais à mes risques et périls !
Alors je crois que ce parcours différent sera toujours évoqué quoiqu’il arrive, cette étiquette sera toujours présente et malheureusement me gâchera la vie jusqu’au bout !
Je pense à ce futur où mes enfants me mettront en Ehpad, surprenant ces conversations entre aides soignantes et infirmières parlant des soins à faire à la « trans », à ce futur où je serai une vieille qui radotera « appelez moi Madame », à qui on donnera une pilule rose pour nager dans le bonheur et ne pas sentir cette méfiance généralisée de ses voisins de fin de vie.
Merci de m'avoir lue jusqu'au bout.
Bridget52
Merci pour ta réponse Chris77
Il est vrai que les choses sont plus simples maintenant mais je n’aurais pas su, pu attendre 30 ans de plus, je pense que mon parcours était mûrement réfléchi et préparé avec toutefois cette inconnue sur l’après.
J’ai situé ce parcours entre Nantes et Grenoble, j’aurais dû écrire entre Loire Atlantique et Isère, les indélicats médecins étaient en Isère et dans le Rhône et je n’en ai cité en exemple que 2 pour faire plus simple mais...
Il fut un temps où je nommais cette attitude de la maltraitance médicale. Fort heureusement, il y a peu de médecins imperméables mais c’est toujours trop, (traumatisant).
Citation de Bridget52 #417406
Bravo pour ton témoignage. On se rend bien compte de la difficulté de ton parcours. En tant que cis, la transidentité m'impressionne beaucoup.
Bon courage pour l'Ehpad (lol). La vie y sera plus douce je pense.
l'ehpad, j'espére y aller à reculons et surtout pas trop vite
Dans le genre, aucun respect pour la dignité, l'EHPAD reste un mourroir dans la plupart des cas...
Lourd heritage des années 90/2000
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