
Hello les be-tolérants.
Aujourd'hui, Je m'attaque à un sujet tabou et explosif : l'argent. C'est peut-être même encore plus tabou que la sexualité, surtout ici en France. Ce thème ne laisse personne indifférent, c'est le moins qu'on puisse dire, et il donne lieu à des pensées et des émotions assez paradoxales au premier abord. Je ferai de mon mieux pour conserver une position aussi neutre que possible dans mon explication sur les deux polarités de ce paradoxe.
[b]1. La diabolisation[/b] D'un côté, l'argent a une image plutôt négative et sulfureuse pour la plupart des gens. ils ont la croyance plus ou moins inconsciente que c'est mal d'en avoir, encore plus mal d'en avoir "beaucoup", et surtout que le gagner "trop facilement" est immoral. En France, tout particulièrement, la question des salaires est taboue. [i]"Combien gagnes-tu par mois ?"[/i] semble presque aussi osée que [i]"Quelles sont tes pratiques sexuelles favorites ?"[/i] , et peut-être même encore plus déplacée dans certains contextes (par exemple, la seconde question pourra être plus facilement posée à la fin d'une soirée arrosée entre amis). Tout comme dans le domaine de la sexualité, il y a des normes tacites. La sexualité normale est hétérosexuelle. Et la façon la plus normale et convenable de gagner de l'argent, c'est d'être employé dans une entreprise pour une activité concrète et jugée suffisamment "utile" (dans le sens où même un banquier salarié risque d'être gentiment chambré, s'il a de la chance...).
Si on s'écarte de ce schéma, on s'expose à de la méfiance, de la jalousie, de l'incrédulité, voire du mépris. Exemples : le chômeur / bénéficiaire du RSA qui se verra souvent taxé de "profiteur" ou "feignant". Ou encore, l'entrepreneur qui développe une affaire florissante et sans donner l'impression de trop bosser (car il a su automatiser des processus en amont lui permettant de générer des revenus passifs). Et si par dessus le marché, il emploie des salariés, alors honte à lui ! Les patrons sont des créatures diaboliques, obsédées par le profit. Comme vous le voyez, j'ai une approche plutôt inhabituelle : d'ordinaire, soit on prend parti pour le chômeur contre le vilain patron, soit on prend parti pour le patron contre les feignants. Pour moi, ils sont tous les deux "hors-norme" et victimes de préjugés rarement fondés, sauf exception (oui il y a des gens qui profitent voire fraudent délibérément les organismes, et il y a aussi des patrons qui s'engraissent sur le dos de leurs employés, tout le monde sera d'accord là dessus, mais beaucoup moins se garderont de faire des généralités hâtives).
Bref, on peut comprendre cette diabolisation globale, car quelles références positives à la richesse nous propose-t-on ?
- les scandales autour de certains hommes politiques
- dès le plus jeune âge, à l'école, on nous incite à être meilleur que les autres, à être en compétition perpétuelle, en nous vendant tout ça comme le passeport vers la réussite sociale. Comme si la réussite et l'accomplissement étaient forcément au détriment d'autrui....
- les frasques et provocations de célébrités
- les problèmes liés aux dérives du capitalisme (délocalisations, destruction de la nature...)
- des films peu flatteurs, par exemple [i]Le Loup de Wall Street[/i] qui fait passer les hommes d'affaire et financiers pour des dépravés sexuels drogués sans état d'âme. Ce rejet prend des formes diverses, par exemple on a tous entendu le proverbe bateau "l'argent ne fait pas le bonheur". Personnellement, je trouve cette formule aussi creuse qu'hypocrite. Il y a une part de vrai, mais étrangement, je ne l'entends pratiquement jamais de la part d'une personne à l'aise avec la richesse. C'est surtout du déni, un moyen d'auto-défense, une excuse qu'on se trouve pour ne pas chercher à évoluer, et ça peut concerner un grand nombre de personnes (par exemple une personne de la classe moyenne qui végétera dans un bureau) Je vais être cash : pour moi, c'est analogue au classique "c'est la beauté intérieure qui compte", clamé dans 90 pour cent des cas par des gens se trouvant moches et qui sont en réalité secrètement préoccupés par leur apparence (voire qui ont le [u]culte[/u] de l'apparence, histoire de faire une magnifique transition avec la suite ^^).
[b]2. Le culte[/b] Le culte est bien plus proche de la diabolisation qu'il n'y paraît au premier abord... on sait bien que le contraire de l'amour n'est pas la haine, mais l'indifférence. Au premier plan, il y a cette diabolisation, qui s'est infiltrée dans l'inconscient à cause de toutes les représentations que j'ai listées plus haut (les médias, l'éducation, l'entourage...). Malgré cela, je pense qu'elle est bien plus superficielle et moins ancrée que le culte... Si on répugne tant à parler librement de son salaire, c'est parfois parce-qu'on a honte de gagner tant pour ce qu'on croit être "si peu d'efforts", parce-qu'on a peur du jugement d'autrui, MAIS AUSSI car c'est dévoiler une partie très intime de soi à laquelle on s'accroche farouchement... C'est très insidieux et sans doute encore plus dur à avouer, puisque ça nous renvoie à un état assez "primitif" voire animal (à l'image du prédateur qui planque ses réserves et ne veut jamais, au grand jamais, les étaler...). Je vais vous donner une anecdote réelle de ma vie qui démontrera le contrôle qu'exerce l'argent sur nous : récemment, j'ai eu la désagréable surprise de voir que CDiscount a prélevé 19 euros sur mon compte PayPal. Après enquête, il s'agit d'un abonnement prélevé plus ou moins abusivement (ces fameuses petites lignes de contrat qu'on ne lit jamais). J'ai voulu voir ce que je pouvais faire pour récupérer cet argent sur Internet. Là j'ai vu des hordes de gens furieux témoigner sur les forums. Je comprends l'agacement... par contre, quand ça va jusqu'à passer des heures en démarches, coups de fils, lettres recommandées (au passage, ça finit par revenir aussi cher que les 19 euros lol), là je ne comprends plus. Mon temps est trop précieux pour que je le gaspille à ce point là, on parle de 19 euros.... oui ça peut représenter beaucoup (j'ai été étudiant boursier, donc je sais ce que c'est), mais de là à "péter les plombs" sur les forums, c'est un pas que je ne franchirai pas...
Certains sont également prêts à sacrifier leur vie sociale, familiale, et amoureuse, tout ça pour obtenir une promotion. Le travail et l'argent deviennent le centre de leur univers, d'ailleurs l'une des premières questions sur les sites de rencontres n'est-elle pas [i]"que fais tu dans la vie ?"[/i]. Et ceux qui posent cette question attendent, dans la majorité des cas, des infos sur l'activité professionnelle, pas sur le reste de ce qu'on fait dans nos vies.... Je n'irai pas jusqu'à dire qu'ils sont "intéressés" mais il y a une association étroite entre situation et revenus. Ce culte se manifeste aussi dans la surconsommation effrénée... une quête du "toujours plus". On veut avoir une grosse baraque, une grosse voiture, des appareils électroniques dernier cri... Si j'avais tort, les crédits à la consommation n'auraient pas une telle popularité. Si j'avais tort, il n'y aurait jamais d'émeute lors des soldes (même sur des produits aussi futiles que le Nutella). Vous remarquerez que je mets dans un même panier les biens de consommation et l'argent... dans le sens où les deux génèrent dépendance et émotions excessives. Les radins et les dépensiers compulsifs sont les deux faces d'une même pièce. C'est dans ce sens là que je donnerai raison à ce "l'argent ne fait pas le bonheur" qui est si mal appliqué et compris...
Pour ma part, j'essaie d'avoir une approche neutre, détachée mais aussi décomplexée, vis à vis de l'argent. Décomplexée car pas de niaiseries hypocrites... oui j'aime l'argent, en tant que moyen, et pas une fin en soi. Il n'est ni bien ni mal, tout dépend l'usage qu'on en fait. Détachée car je prends garde à ne pas en devenir esclave. Ce n'est sans doute pas pour rien qu'on parle de "liquidités" : le plus on s'obsède à le contrôler, le plus c'est en réalité lui qui nous contrôle et nous glisse entre les doigts.
Ce thème est très vaste, et malgré la longueur, j'ai peut-être oublié des choses à dire... :)
Merci de m'avoir lu.
Date de publication : 16/03/2018 à 13:30
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