Bonjour
En tant qu'homme menant une vie hétéro, j'ai toujours eu un rêve d'avoir une amitié proche. Mais comme j'ai été élevé dans des milieux très homophobes, toute marque de tendresse ou tout besoin affectif trop prononcé était automatiquement associé à de l'homosexualité. Aujourd'hui, la pensée dominante a changé mais, au fond, on n'a guerre évolué : Tout ce qui a trait à une relation proche entre deux hommes est vu comme une relation homosexuelle, comme lorsque j'étais ado (la seule différence avec les années 90, c'est que maintenant, c'est plus un problème). Je respecte ceux qui choisissent le modèle du couple gay et de la relation exclusive comme voie d'épanouissement de leur personne, de leur affectivité et de leur sexualité. Mais qu'en est-il des personnes (des hommes) qui ne se reconnaissent pas dans ce modèle d'exclusivité et de relation amoureuse ? Où sont-ils ? Comment vivent-ils cette pensée unique qu'on continue de poser sur une relation proche entre deux hommes ? Où sont les hommes qui reconnaissent leur besoin de connexion émotionnelle forte avec un autre homme, qui souffrent de ne pas réussir à en avoir à cause de cette approche amoureuse exclusive qui leur fait fuir tout rapprochement ou fait fuir leur partenaire ?
Je suis sûr d'une chose me concernant : me passer de sexualité avec un homme me paraît paradoxalement assez facile même si je peux parfois avoir des désirs homosexuels. Mais me passer d'amitié, de connexion émotionnelle, de soutien mutuel, de tendresse même, de câlins, ça je trouve ça beaucoup plus inhumain.
Y a -t-il d'autres personnes qui se posent les mêmes questions ?
Ca me fait au mot americain "bromance". C'est la contraction de brother et romance décrivant une relation d'amitié très forte qu'on pourrait qualifier de fusionnelle. Les amis sont si proches qu'un lien de sang familial les unirait.
Aux Etats Unis, on est plus tactile. Le "hug", c'est a dire un enlacement de l'autre est une marque d'amitié courante pour dire bonjour et au revoir. La culture y est aussi plus enjouée. Est ce que l'origine du mot américaine explique déjà une moindre propension en France à un attachement si fort, où nous serions raleurs et distants ?
Les calins me ferait dire qu'on bascule toutefois dans autre chose qu'une amitié. En tout cas on est au delà de la bromance. Il s'agit d'une relation de couple sans sexe. Un tel couple asexuel ferait donc évidemment concurrence à une relation amoureuse exclusive puisque un couple asexuel est à mon sens un couple amoureux.
Citation de JLS29 #525599
Merci pour ce partage d'expérience qui laisse penser que lorsqu'on prend de l'âge, il est peut être trop tard pour créer une telle bromance. La méfiance, le septicisme encore ou l'indépendance qui viennent avec l'âge ne rendraient plus possible la spontanéité d'une amitié fusionnelle et instinctive.
Citation de Kilik #525762
Bonjour,
Je rebondis sur ce terme de "bromance" que je ne connaissais pas. C'est exactement ce dont j'ai rêvé toute ma vie . J'ai eu des camarades mais qui n'avaient pas ce besoin d'amitié complice, fusionnelle, de confident.
Est-ce que je suis un doux rêveur ? Est-ce une utopie ces amitiés entre hommes ?
J'ai l'impression que ces amitiés fortes entre hommes sont rares. Et quand on vieillit c'est encore plus difficile de créer cette relation affective forte.
La main de l'amitié.
Citation de Ami Cal 16 #525785
Merci Ami Cal pour ce que tu écris. J'ai lu ton profil aussi et je crois que j'aurais pu écrire tout ce que tu as écrit. Et effectivement, en avançant en âge, les occasions de relations se raréfient, alors en trouver une où la tendresse est partageable, ça paraît insurmontable.
Néanmoins, j'ai envie de créer un espace non pas de rencontre mais au moins de soutien émotionnel pour les personnes comme toi et moi qui vivent cela, pour s'encourager à chercher, quelquesoit l'âge. L'idée que j'ai eue serait au moins de parler de nos recherches,de nos réussites, de nos espoirs, de nos peines car, me concernant, j'ai eu de nombreux revers sur cette route.
C'est vrai que l'âge avançant, c'est plus difficile mais comme l'attirance pour des hommes très beaux se relativise aussi avec l'expérience quand on réalise que la beauté va rarement avec l'authenticité et la véritable connexion émotionnelle. On comprend mieux aussi avec l'âge qu'il y a beaucoup de joies à trouver dans l'amitié et le partage de choses simples, même si c'est pas une vie à deux permanente.
Je réalise de plus en plus combien c'est important de partager quelques moments de connexion émotionnelle entre hommes pour moi. Quand c'est possible, le sentiment de solitude et même les fantasmes homo diminuent...
Je peux en témoigner, j'ai vécu une relation proche il y a quelques années avec un ami "homo" qui ne voulait plus entendre parler de couple gay suite à de grosses difficultés. C'était vraiment une période positive. De tels liens passent automatiquement par une phase au moins un peu amoureuse et comme on a réussi à en parler, on s'est libérés mutuellement de ce sentiment amoureux qui vit de peur de perte de l'autre en se disant qu'on resterait là l'un pour l'autre dans tous les cas. Je comprends que la relation proche entre hommes en fasse rêver plus d'un. Et je crois qu'ils ont raison car ça fait beaucoup de bien. Mais rien ne dit que seule la relation homo permet cela... Bienheureux ceux qui y arrivent, mais je pense qu'il doit y avoir aussi beaucoup de déçus et d'aigris, voire d'hommes qui s'enferment dans la solitude faute de relation proche...
Qu'en pensez-vous les vieux et les bientôt vieux (dans lesquels je m'inclus !!), les pas beaux, les aigris, les déçus, les misanthropes ?
Faute de rencontre, partage et soutien fraternel, ça vous dirait pas ? Cette idée revient souvent chez moi...
Citation de Jmciotat #525596
Bonjour l amitié et par définition toujours présente mais entre deux personnes faut la bâtir et pour cela faut être deux car chacun nous avons seulement que 50 pour cent que cela fonctionne
C'est sûr. Il faut être deux pour construire une amitié aussi où il y ait de la fidélité, de la tendresse. Et peut être traverser aussi des tempêtes. Seulement alors on réalise l'importance de ce lien...
Si certains d'entre vous ont envie de partager leur expérience en terme d'amitié, je serai heureux de vous lire parce que c'est un sujet qui est difficile à aborder et rare.
La recherche d'une amitié fusionnelle me semble plus difficile que la recherche de l'amour. Plus difficile parce qu'il n'y a pas la passion du début qui masque ou compense les défauts de l'autre.
L'amitié fusionnelle a probablement plus de chance de nous tomber dessus que d'être découverte par une quête assidue.
Ca me fait penser à des amitiés de type band of brothers nées dans l'adversité tel le service militaire ou la guerre. Mais je n'ai vécu aucun des deux. C'est une idée que je m'en fais.
Faut il d'abord souffrir ensemble pour comprendre comment vivre intensément cette relation ensuite ?
Je suis encore perplexe sur la nature de la recherche : amitié ET caresse. Comme je l'ai déjà dit la combinaison des deux me parait être une relation de couple.
En ne cherchant que les caresses, on peut s'intéresser au principe du hug. Ca veut dire éteindre une personne juste pour se sentir connecté entre humains. Je me rappelle un membre qui voulait créer un club de hug...
J'aime ton message Kilik. Je te rejoins sur ce que tu dis, ça me touche d'ailleurs.
Citation de Kilik #531575
"L'amitié fusionnelle a probablement plus de chance de nous tomber dessus que d'être découverte par une quête assidue."
J'en arrive exactement à la même conclusion. J'ai compris que c'était cette quête assidue qui me détruisait, la peur de la solitude, la peur de ne jamais rencontrer ce type de relation. Mais que c'est parfois difficile, cette impression de devoir renoncer à tout. L'idée est plutôt de renoncer à chercher par soi même ou à définir ce qui est bon pour soi. Il y a plus de joie en fait à s'ouvrir à ce qui est qu'à chercher à susciter les choses qui finissent toujours par décevoir puisqu'on les a plus ou moins artificiellement provoquées.
"Ca me fait penser à des amitiés de type band of brothers nées dans l'adversité tel le service militaire ou la guerre. Mais je n'ai vécu aucun des deux. C'est une idée que je m'en fais."
Complètement d'accord. J'ai un ami qui m'a montré une lettre envoyée par son grand père à sa femme pendant la guerre. La confrontation à l'adversité nécessitait bien souvent le soutien d'amitiés. Sans regretter du tout cette époque douloureuse, je trouve que l'amitié reste une douceur de la vie assez chouette même et surtout lorsque les circonstances s'assombrissent.
"Je suis encore perplexe sur la nature de la recherche : amitié ET caresse. Comme je l'ai déjà dit la combinaison des deux me parait être une relation de couple. "
Je comprends ta remarque. Je parle plus de tendresse que de caresse car la tendresse va bien au delà de l'aspect physique. Mais peut être en effet vaudrait-il mieux parler de bienveillance. J'envie les femmes qui parviennent à vivre la dimension de tendresse sans aucun lien avec le couple ou avec le sexe.
Ce que je veux dire, c'est qu'un bon hug en effet, dans certaines circonstances, fait quand même énormément de bien. Même si on sait en effet ce qu'on risque et ce qu'induit la violence du désir quand il se présente. Car après tout, je crois qu'il s'agit d'une certaine violence. Si on respecte cette limite où le désir reste gérable et ne s'empare pas intégralement de soi ou de l'autre, si on construit cette confiance où on sait que l'autre respectera ça, je pense que la tendresse peut être vécue de manière incroyablement salvatrice et réparatrice... En tous cas, c'est ce que personnellement j'ai vécu. Je ne le vis plus actuellement et la tentation de la tristesse se fait naturellement plus forte. Mais je peux en témoigner, pour avoir connu aussi la violence du désir et d'y avoir succombé, la tendresse a disparu dès le jour où c'est la violence du désir et du fusionnel qui a pris le dessus. J'ai alors perdu quelquechose auquel je tenais pourtant beaucoup : une simple proximité physique, libre, tendre. Passer sa main sur la joue de l'autre ou son épaule, lorsqu'on est dans cette tension intérieure, apporte beaucoup de bienfaits. Tout ça disparait lorsque le désir s'invite... C'est mon impression...
Après il n'y a pas que la violence du désir sexuel qui me semble barrer la route à cette tendresse. Il y a les barrières des egos aussi. Le besoin de dominer l'autre (en cachant ses émotions par exemple, en les dominant, en masquant sa vulnérabilité, en feignant l'indifférence...), ou à l'inverse la dépendance excessive à l'autre, forme de soumission qui manque d'équilibre. Tout ça je l'ai vecu, ce sont aussi des poisons de l'amitié, ils finissent par la tuer. En tous cas, c'est sûr que c'est rarement un chemin tranquille. Mais quand on parvient à dépasser tout ça, si l'autre est toujours là, malgré les hauts et les bas, ben des fois, on regarde les photos à deux et on se surprend à voir cette dimension qu'on intuitait un peu : le temps long construit... c'est toujours le temps court qui détruit...
C'est vrai, une bonne grosse amitié bien profonde❤️
Toi aussi t'aimes ça coquine
Citation de Kilik #531594
"Etait ce juste un moment d'égarement ou la conclusion logique d'une proximité fusionnelle ?"
Plutot la conclusion logique d'une proximité fusionnelle. Après cela, la relation change totalement de mode et bascule dans qqch de différent. Un peu comme le soulignent ces gens qui ne voient que du sexe partout. Tout est alors vu au travers du désir sexuel. C'est rigolo au début et puis ça finit par être lourd.
"Une autre interrogation que j'ai concerne la motivation de cette relation. A la chercher pour combler un vide, on risque de s'y prendre à l'envers, puisque on attend uniquement des avantages. Alors que cette amitié devrait être le fruit d'une bienveillance totale tournée vers l'autre, qui s'alimente par des dons (attention, affection, écoute, aide,...) mutuels et constants faits à l'autre."
C'est très vrai et aussi très beau ce que tu écris. C'est un peu comme le désir sexuel finalement. Il peut devenir tellement synonyme de vide ou de besoin qu'on se met à utiliser l'autre. Très juste. C'est un truc que j'aimerais bien arriver à vivre un jour...
Citation de Jmciotat #531590
Je pense que c'est souvent dans l'adversité ou dans les épreuves ou joies "vécues ensemble" que se construisent les amitiés les plus durables et les plus fortes. (Guerres, catastrophes, service militaire, parfois scolarité etc...)
Le mode de vie actuel ne favorise pas ces relations amicales intenses entre hommes ou chacun se cache derrière un écran et ne cherche pas à connaître vraiment l'autre.
J'ai souvent cette pénible impression d'indifférence de la part des hommes qui ne cherchent pas à connaître intimement l'autre , ses émotions, sa fragilité, ses qualités et ses faiblesses. C'est le fameux "sans prise de tête" très à la mode sur les sites de rencontre. C'est à dire une relation jetable !...
J'ai l'impression que lorsque l'on recherche surtout une amitié sincère entre hommes on n'interesse pas, on est rejeté. Et si l'on ajoute les critères de l'âge et des distances les chances de construire des amitiés solides sont quasiment nulles...
Mais je demeure ouvert à cette idée de partage et soutien avec ceux qui en ressentent le besoin.
La main de l'amitié.