Deuxième partie et fin.
Je me suis réveillé en plein milieu de la nuit dans les ténèbres, tout était noir. Je dis que je me suis réveillé, disons plutôt que je fus réveillé par ce qui était en train de me secouer comme un pommier, je hurlais de douleur. Ca m’agrippait, comme pris dans un étaux, je sentais ses griffes rentrer dans mes épaules. Ca me secouait avec une telle violence que ma tête heurta le montant du lit, je crus bien m’évanouir. Le son que ça émettait, le « grrrrrr » grave, fit place à des grognements dès que j’ai commencé à me débattre. J’ai essayé de donner des coups de pieds, mais ça me tenait par les épaules et je ne pouvais rien faire. Alors prenant appui sur mes jambes, j’ai tenté de me dégager en pivotant sur moi-même, j’ai eu très mal, les griffes m’ont littéralement déchiré les épaules quand je me suis arraché de sa prise. Je reculai vers le pied de lit, je sentis une douleur atroce me parcourir le dos, j’entendais maintenant derrière moi comme le hurlement d’un cochon qu’on égorge, j’étais complètement terrorisé. Je courus hors de la chambre, il n’y avait pas de lumière dans le couloir. Je me jetai sur l’interrupteur, mais rien ne s’alluma. Pris de panique, entendant ce qui était derrière moi approcher, je me précipitai dans le couloir de l’immeuble, j’allumai la lumière, qui fonctionnai. J’entendis alors comme des petits cris de chien battu venant de mon appartement. J’étais nu, dans le couloir de l’étage de mon immeuble, les épaules et le dos gravement et profondément écorchés, avec ce truc dans mon appartement qui allait me sauter dessus dès que je me retrouverais dans le noir. Comment voulais-tu que j’aille voir un voisin pour lui dire ça et demander de l’aide. Heureusement que la moquette du couloir était sombre, car je pense que les voisins auraient vu au petit matin les taches de sang que j’avais laissées. Quant à moi j’avais décidé d’attendre que le jour arrive, je m’étais caché dans la cage d’escalier de l’immeuble. Je me suis dit que les gens prennent tous l’ascenseur et que je ne serais pas surpris si je restais là. Il faisait très froid, je n’en pouvais plus. Mon sang, qui avait fini par arrêter de s’écouler au bout d’un moment, avait tacheté le sol en béton. Je gardais le doigt pressé sur l’interrupteur, craignant plus que jamais de me retrouver dans l’obscurité. Pendant tout ce temps où je suis resté là à attendre, je n’arrêtais pas de me demander pourquoi les lumières ne s’étaient pas allumées dans mon appartement quand j’avais essayé.
Quand j’entendis les premières personnes sortir de chez eux, cela faisait bien quatre heures que j’étais dans la cage d’escalier, derrière la porte, nu, en chien de fusil, le bras tendu vers l’interrupteur pour tenir la lumière allumée. J’étais frigorifié, je tremblais de partout. J’entrouvris donc la porte, jetai un oeil dans le couloir, il n’y avait personne, la porte de mon appartement était toujours ouverte, je voyais de la lumière, je n’avais pas fermé les volets, et la lumière du jour éclairait maintenant mon appartement. Je courus jusqu’à l’entrée, ça n’avait plus l’air d’être là, je vérifiais qu’il n’y avait plus rien dans chaque pièce, attrapais ma couette au passage dans la chambre, retournais à l’entrée, fermais la porte et m’effondrais, le dos contre le mur de l’entrée. J’étais épuisé, je me suis enroulé dans ma couette. Quelques minutes plus tard je m’endormais.
Je me suis réveillé un peu avant midi. J’avais le dos et les épaules en feu, je n’étais évidemment pas allé travailler, n’ayant pas encore le téléphone dans cet appartement de fortune, ils n’avaient aucun moyen de me contacter au travail. Mais ce n’était pas mon travail qui me tourmentait le plus, je voulais savoir pourquoi les lumières étaient toutes éteintes cette nuit quand je fus agressé. Je devais être vraiment complètement désorienté pour ne pas avoir compris plus tôt. Le compteur d’électricité était à l’intérieur de l’appartement, mais tout près de l’entrée et il était coupé. Une heure plus tard, je sortais dehors pour aller acheter des bougies, j’en profitais pour appeler au boulot et demander un jour de congé car je me sentais mal, mon patron n’était pas content. Après mes achats, je revins chez moi, avec un sac rempli de bougies.
Avant que le soleil ne se couche, j’avais disposé les bougies un peu partout dans ma chambre. Leurs lumières, ajoutées à celles du plafond, emplissaient la chambre. Cela me rassurait, et même si le courant était coupé je n’aurais pas été pris au dépourvu. Malgré tout je n’arrivais pas trop à dormir.
Il était trois heures du matin, je ne dormais toujours pas. J’entendis le « clac » du disjoncteur à l’entrée, les lumières s’éteignirent. Il était là, il était encore venu. Je ne bougeais pas de mon lit, j’avais peur et je tremblais, mais avec les bougies ce n’était pas la seule pièce éclairée, je n’allais donc pas sortir de là. Sans surprise, j’entendis son grognement rauque approcher de la porte, puis il se mit à pousser de longs rugissements caverneux, ils s’accompagnaient de sifflements comme ceux de la respiration d’un asthmatique, j’étais terrifié. Je restais caché dans ma couette, n’osant plus bouger d’un pouce. Ca n’entra pas. Progressivement les cris redevinrent grognements, à cause de la lumière des bougies ça ne pouvait pas entrer. Même si j’avais toujours peur, je me sentais mieux, plus en sécurité.
Au bout d'une heure j’avais sombré dans un demi-sommeil, je poussais un petit cri de surprise quand je vis la porte de ma chambre s’entrebâiller doucement. Je vis alors passer le dossier d’une des chaises de la cuisine qui balaya les bougies près de la porte. Les grognements firent de nouveaux place aux longs cris graves et sifflants. J’étais encore blotti dans ma couette, d’où ne dépassaient que mes yeux, j’attendis jusqu’à sept heures du matin, pour m'endormir, malgré sa présence derrière la porte de ma chambre. Je l’entendais toujours grogner.
Je me réveillais encore une fois vers midi, je mis bien deux heures pour me préparer à sortir. Même si j’avais trouvé la parade, j'avais déjà peur à l’idée de devoir dormir bougies allumées pour toutes les nuits à venir. Je fis quelques courses, j’achetais cette fois-ci un plus grand nombre de bougies. Puis, je suis allé à reculons dans une cabine téléphonique pour appeler à mon travail. J’eus droit à de sérieuses remontrances, je me confondis en excuses pour ce deuxième jour d’absence, mais je n’avais pas le choix, il fallait que je retourne au travail le lendemain.
Même si ce ne fut pas de sommeil profond, je passais une nuit de repos presque complète. Au réveil, les bougies étaient toujours allumées, je n’avais pas entendu de grognements. Je suis allé manger un morceau de croissant et me fis un café, puis je suis allé prendre une douche. Je ne voulais pas être en retard pour reprendre mon travail, surtout que j’allais devoir subir les reproches de mes absences, rien que d’y penser cela me tracassait, mais de toute façon je ne pouvais pas y couper.
Je suis allé prendre une chemise dans le placard mural de la chambre après ma douche. A peine j’avais entrebâillé la porte de la penderie qu’une main osseuse, surgit de l’entrebâillement et me saisis au poignet. Je n’ai pas eu le temps de comprendre ce qui m’arrivait, elle me tira avec une telle force et une telle violence vers le placard, que je fus comme projeté contre la porte. Le choc m’étourdit, je n’avais plus la force de m’échapper, et de toute façon ça ne m’a pas laissé le temps de reprendre mes esprits. La main me tira pour me projeter une seconde fois sur la porte du placard et ma tête cogna cette fois-ci sur le coin de la porte. Je ressentis une décharge de douleur au crâne, tout devint sombre, j’entendis un bourdonnement dans mes oreilles, puis ce fut les ténèbres.
Je ne pense pas être resté sans connaissance bien longtemps, je suppose que je me suis réveillé à cause de la douleur. Je sentais ses coups de griffes me déchirer le haut du visage jusqu’au nombril, elle me labourait les chairs, la douleur était atroce, et il faisait complètement noir autour de moi. Sa patte fit un nouveau un passage complet de mon épaule gauche jusqu’au bas des mes côtes, je hurlais de douleur. Poussé par l’effroi je me projetais contre la porte, elle s’ouvrit en me laissant tomber sur le sol, je relevais la tête, les bougies étaient toujours là, allumées. J’avais du mal à garder les yeux ouverts, je me passais alors la main sur le visage, puis l’examinai, elle était recouverte de mon sang. La douleur était atroce, je n’arrivais pas à dire où j’avais mal, tout le haut de mon corps n’était plus que douleur. Péniblement je me relevais, puis décidé à demander à l’aide je me dirigeais au dehors de mon appartement, j’avais du mal à marcher, je jetais un coup d’œil à mon ventre, il était couvert de sang, je réalisais que j’étais nu, mais je n’avais plus de forces, il fallait que je sorte. J’ouvris la porte d’entrée, je sortis en m’appuyant sur la poignée, je fis encore quelques pas en titubant dans le couloir avant de m’écrouler sur le sol. J’entendis une voix de femme dire « Oh, mon dieu », puis plus rien.
Je me suis réveillé dans cette chambre, au début je ne sentais rien à cause des anti-douleurs, mais je pense que je vais maintenant en demander plus pour passer la nuit, car je commence à avoir mal. Je me suis regardé tout à l’heure dans une glace, ils m’ont bandé une bonne partie du visage, j’ai soulevé un peu les bandes pour regarder au-dessous, et se n’était pas beau à voir. J’ai fini par pleurer tout en éclatant de rire en me disant que mon visage devait plus tenir du steack haché que de celui d’un homme. Mon bras gauche, mon torse, et mon ventre sont bandés, je n’ai même pas regardé, de toute façon je sais dans quel état ils sont.
Voilà donc où j’en suis depuis qu’on s’est quittés. j’ai besoin que tu viennes me tirer d’ici. Je ne vais pas...
« Monsieur Le Bel ? »
Passer ma vie ici à bouffer leurs médocs.
« Monsieur Le Bel ?
Oui.
Monsieur le Bel, il est vingt heure, c’est l’heure de dormir.
Déjà ?.
Il faut aller dormir, c’est comme ça ici, c’est pareil pour tout le monde.
Mais ma lettre ?
Vous la finirez demain matin, vous pouvez la laisser sur la table, il ne lui arrivera rien vous savez !
Mais...
Allez Monsieur Le Bel, vous devez prendre vos médicaments avant.
Mes médicaments ?.
Il allait répondre, puis se ravisa, ça ne servait trop à rien de discuter avec l’infirmière, de toute évidence elle se bornait au règlement. Il se glissa dans le lit, habillé d’une de leur « robe de chambre » : un tablier en tissu, fermé à l’arrière par un nœud sur un petit cordon. Il se demanda si ça les excitait de voir ainsi les fesses des patients à nu toute la journée.
« Voilà, maintenant prenez vos médicaments ».
L’infirmière tendit un gobelet au fond rempli de gélules, puis un autre rempli d’eau. Il regarda l’infirmière pour lui demander s’il devait tout prendre. En voyant son regard fixé droit sur lui, il se ravisa et goba toutes les gélules puis les avala d’une rasade d’eau. Le visage de l’infirmière passa de l’agacement au sourire.
« Eh bien voilà, quand vous voulez, vous y arrivez ! »
Sans répondre, il tendit les deux gobelet vides à l’infirmière. Celle-ci les rangea sur son chariot puis le poussa jusqu’à la sortie de la chambre.
« Non ! s’il vous plait ! J’ai besoin de la lumière. »
L’ infirmière gardait son doigt sur l’interrupteur.
« Vous avez la veilleuse dans le couloir.
Oui, mais elle ne fera pas assez de lumière dans la chambre.
Bon, Monsieur Le Bel, vous allez dormir. Pour la lumière ce soir c’est non, vous demanderez demain matin au médecin.
Mais..
Allez dormez, demain vous en parlerez avec le docteur, en attendant j’éteins.
Elle éteignit la lumière puis sortit de la chambre sans même le regarder.
La veilleuse du couloir produisait un peu de lumière, mais une bonne partie de la chambre restait plongée dans le noir. Il s’enfouit sous les couvertures, apeuré, à l’écoute de chaque son.
Le sommeil commençait à le gagner, il luttait pour garder les yeux ouverts, il avait chaud sous les couvertures, il se sentait bien, détendu, comme dans du coton.
« Hein ! »
Il entendait distinctement le grognement juste à côté de lui. Complètement pris de panique il sauta du lit du côté opposé et se rua vers la porte, il déboula dans le couloir en hurlant,
« AU SECOURSSS IL Y A QUELQUE CHOSE DANS MA CHAMBRE ! A L’AIDEEE ».
L’infirmière qui était passée lui donner les gélules ressortit d’une des chambres d’à côté. Une autre infirmière arriva aussi, elles accoururent vers lui.
« On se calme monsieur !
A L'AIDEEE.
MONSIEUR CALMEZ VOUS !
Les deux infirmières se regardèrent d’un air interrogateur.
« Bon, ben tu lui dis de venir ?
D’accord.
Il s’adossa contre un mur, épuisé.
« Ne me laissez pas dans le noir, je ne veux pas retourner dans la chambre.
Oui oui monsieur Le Bel, calmez vous, ça va aller.
Qui va venir ?
Un médecin.
Le psy de garde ? C’est ça ?
Oui, il va juste vous aider à rester cal..
Le médecin déboula par la porte battante au bout du couloir.
« Alors on arrive pas à dormir ?
C’EST DANS MA CHAMBRE. IL Y A QUELQUECHOSE. C’EST PARCE QUE J’ETAIS DANS LE NOIR.
Monsieur calmez-vous...
PUISQUE JE VOUS DIT QUE C’EST DANS LE NOIR, DES QU’IL Y A UN COIN SOMBRE C’EST LA.
Un homme costaud qui était arrivé entre temps lui prit les bras par derrière et le maintient.
« CA VOUS ATTEND DERRIERE LA PORTE DE VOTRE CHAMBRE, LA OU VOUS N’AVEZ PAS DE LUMIERE ALLUMEE ! CA SE JETTERA SUR VOUS PAR SURPRISE ! VOUS VERREZ. JE NE VEUX PAS RETOURNER LA DEDANSSS.
Le psychiatre de garde, visiblement fatigué et énervé prêta main forte au gros bras qui le tenait toujours fermement. A eux deux, ils le traînèrent jusqu’à sa chambre. Ils le plaquèrent sur le lit pendant que les infirmières scellaient les attaches métalliques aux poignets et aux chevilles.
« Allez, maintenant on dort !
l’infirmière sans prêter attention à ses cris et sans un regard lui fit l’injection dans son bras.
« Avec cette dose au moins il va dormir, c’est sûr. »
Ils éteignirent la lumière puis sortirent sans un regard dans sa direction.
« A L’AAIDEEE. LAISSEZ-MOI SORTIR D’ICIII ! AAAAUUU SECOUUURSSS, Aaiiiddeeez mm moi à sort… à sortiiir d’iciii... A l’aidee… au… au secours, sss’il vous.... ppp... plaaitt, je... vous... en... sup... pl... ...»
Merci Shali d'avoir aimer et apprécier ma première et deuxième partie de mon histoire. C'est vrai qu'elle n'ai pas facile à comprendre, mais avec un peu d'imagination on y arrive.
C'est la suite de quelle histoire ?
C'est la suite et fin de " Dans le noir, la peur au ventre ". J'ai pas su remettre le titre de la première partie.
Merci Reloteb d'avoir lu mes deux parties de mon histoire.
Citation de Montana #514481
Je ne retrouve plus la première partie. Tu aurais un lien ?
Reloteb, va dans art et lettres et trouveras mon texte " Dans le noir, la peur du noir ".
Hey Montana! On s'accroche en se demandant comment ca va finir. On a hâte et en meme temps on voudrait que ca continue tellement tu arrives à nous captiver ! Encore une pepite !
Ceci dit, je vais etre rabat-joie et souligner un petit defaut de narration et une incoherence:
Le narrateur passe de "je" à "il" sans trop que l'on comprenne pourquoi ni comment
Citation de Montana #514569
J'ai retrouvé le lien : https://betolerant.fr/forum/25133/dans-le-noir-la-peur-au-ventre
Par contre , tu as dis que le titre est "Dans le noir, la peur du noir" mais le bon titre est "Dans le noir, la peur au ventre".