La Chemise De Nuit Du Bassin d’Arcachon (conte)

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Ordalie
14/07/2024 à 09:17 - 14/07/2024 à 09:20

Bonsoir.

Comme vous le savez déjà, je vis dans des contrées magiques. Et de ce fait, il m’arrive des histoires merveilleuses. Je vais, ce soir, vous conter l’une d’elles.

Cette histoire m’est arrivée lors du week-end prolongé du 14 Juillet 2023. J’étais chez une amie, sur le bassin d’Arcachon, dans la vallée de la Leyre, pour être plus précise. Cette amie m’avait invitée chez elle pour passer ce moment, en sa compagnie. Enola, pour ne pas la nommer, avait stocké plein de vêtements et me proposait d’en récupérer quelques-uns.

Nous étions en train de fouiller dans des sacs, des cartons, de faire des essayages, en gloussant de plaisir. Et à un moment, elle me regarde.

  • Attends. J’ai quelque chose pour toi, Mamie. Tu vas a-do-rer.

Et..., elle me tend un sac rempli de chemises de nuit, ... de chemises de nuit de grand-mères. Et j’ai vu un sourire dans ses yeux.

  • Regarde. Ça, c’est pour toi. J’y ai pensé quand je les ai mises de côté. Tu vas ki-ffer.

Je me jette sur ce sac, je trie, j’essaye. Et, il y en a une qui me tape dans l’œil. C’est une chemise de nuit légèrement bleutée, certainement les séquelles d’une attaque du monstre des chaussettes. Elle est un peu côtelé, en cotonnade un peu épaisse, brodée au niveau des épaules de petites fleurs bleues et jaunes, avec un petit liseré en dentelle en dessous pour faire un plissé, ainsi souligner la poitrine et, sans manche. Elle sort du lot. Je la trouve très belle. Je me mire dans la glace. Je me teste avec elle. Je me tourne, je virevolte.

  • Enola, tu vois. Avec une petite ceinture, cela ferait une belle robe d’été, quelque part. Tu ne trouves pas ?

Nous rangeons ce sac de chemises de nuit. Et continuons notre tri. Nous finissons de choisir des vêtements. Un essayage à rigoler entre filles. Moment de partage et de complicité.

Et là, machine à laver, vite fait. Il fait beau, le sud, le soleil, tancarville sur la terrasse. Hop, dans l’après-midi, la chemise de nuit était sèche.

Je l’enfile. La nuit, je m’endors.

Mais cela ne va pas. Je me bats avec elle. Je ne sais pas ce qu’il se passe. Elle est pourtant très largue. Mais, je me sens enserrée. Je me bats. Je ne suis pas bien. Elle me cisaille sous les bras. Elle me gratte. Je me tourne, je me retourne. Et à un moment, je m’arrête.

  • Qu’est que tu as ? Qu’est ce qui se passe ? Ça ne va pas ? D’habitude, je n’ai pas ce problème-ci.

Et là, je fais une chose qui va vous sembler inhabituelle, j’écoute cette chemise.

  • Vous savez, vous m’avez racontée quelque chose qui m’a fait rêver. Vous m’avez parlée d’un ascenseur social. Vous m’avez dit que je pourrais être une robe d’été.

Vous m’avez fait rêver avec cela. J’aimerai être une robe, marcher le long des rues, au bord de l’eau dans la vallée de la Leyre, voir les fleurs, m’émerveiller devant le vent qui danse avec l’herbe, voir le soleil qui se lève, suivre le vol des oiseaux, entendre leurs chants. Je me vois, déambulante, dans les jolis marchés du Sud aux mille et une couleurs, aux mille et une senteurs.

Mais là, présentement, je ne suis qu’une chemise de nuit. Je vois le jour, bien entendu, comme lorsque vous m’avez mise à sécher au soleil. Je ne vois pas que la nuit. Mais c’est uniquement quand ma propriétaire, ma patronne traîne dans la maison, le week-end pyjama entre filles, en mode chill ou en mode déprime. Je vois le soleil, bien entendu, mais à travers les vitres de la véranda ou vite fait quand elle va étendre le linge qui a été lavé durant la nuit. Mais ce ne sont que des instants.

Et oui, vous m’avez fait rêver d’être une robe, de ne plus vivre dans la pénombre, dans la nuit ; mais vivre en pleine lumière sous le soleil.

Du coup, je me suis levée. Je vois bien que c’est foutu pour la nuit. Si je la garde, elle va encore se battre avec moi. Je la mets dans un coin. Je prends une autre chemise de nuit. Je termine ma nuit, tranquillement.

De retour en Bourgogne, un matin, j’ai pris cette robe. Finalement, on va l’appeler robe, je l’ai repassée. Je l’ai enfilée, je mis une ceinture, en tour de taille. Et là je constate qu’elle est très agréable à porter. Elle ne me gratte pas, elle ne me coupe pas sous les bras. Je suis allée au bureau en sa compagnie. Nous fûmes charmantes et charmeuses toutes les deux.

Et ce soir, grâce au Relai.s des Futurs et grâce à votre présence, elle est devenue bien plus qu’une robe, elle est devenue un moment de théâtre. Elle a pu connaître les feux de la rampe. Et j’aimerai qu’elle connaisse aussi vos applaudissements.

Merci pour elle et bonne soirée à toustes.

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avatar contributeur de Inframince
Inframince
14/07/2024 à 12:50

Merci pour ce conte savoureux. On y était. Longue vie à cette chemise de nuit en robe d'été ! 👏✌️

avatar contributeur de Crème2Cactus
Crème2Cactus
14/07/2024 à 14:56

Citation de Ordalie #515702

Merci, c'est très joli 🙂.


"Il n’y a pas de malheur qu’un éclair au chocolat ne puisse consoler" Adrienne Monnier.

Un bon éclair au café, ou un bon cheesecake peut aussi faire l’affaire... Ça, c'est de moi, rires.

avatar contributeur de Acha
Acha
15/07/2024 à 22:16

Quelle jolie et poétique métamorphose! Merci beaucoup. 😊

avatar contributeur de Harmonique
Harmonique
26/08/2024 à 12:31

J'aime bien cette vision de faire vivre une robe. Elles le méritent souvent.

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