Bonjour à tou-te-s
Je suis le conseil de zababa 😉 , suite à la discussion entre filles du soir d'Halloween. Je leur ai parlé d'un livre qui me plaît énormément, et elle m'a dit d'ouvrir un sujet dessus, et finalement, j'étends le sujet à tous les romans "historiques" qui en valent la peine selon vous. Pour tou-te-s les fans de lecture, au coin du feu, sur la plage, sur un banc public, ou dans son lit...
J'ouvre le bal, malgré mes talents de danseuse assez limités...
Le livre dont j'ai envie de parler est La nuit du premier jour, écrit par Theresa Révay. Je ne connaissais pas du tout cette auteure, c'est une belle découverte.
Ce roman raconte l'histoire intime de Blanche, une femme mal mariée de la grande bourgeoisie lyonnaise, à la fin du 19e siècle. On suit son histoire, et celle de ses proches, avec des sauts dans le temps, entre 1896 et 1920.
J'ai aimé ce roman car j'ai rarement lu une fiction où une présentation très documentée de la société, de la politique et de l'économie s'insère aussi naturellement dans le récit de vies bousculées par la décision hors du commun de cette femme courageuse. On y apprend des choses passionnantes sur le milieu de la soierie lyonnaise, avec ses canuts indomptables, ses soyeux qui les exploitent, mais qui ont dû apprendre à les respecter, sur les liens économiques entre Lyon et le Proche Orient, à cause de la soie. On est plongé dans le monde patriarcal de cette bourgeoisie, qui cherche à écraser le destin des femmes, sauf que là, justement on découvre des femmes qui s'émancipent de ce carcan. Et puis on voyage aussi en Syrie et au Liban, alors que ces territoires sont encore sous la domination de l'Empire Ottoman agonisant, dont les dirigeants cherchent à préserver la puissance déclinante, au prix de la liberté et de la reconnaissance des peuples arabes de la région, où se mêlent juifs, musulmans et chrétiens. La Première guerre mondiale est une rupture majeure pour tous les personnages, évidemment, avec ses souffrances indicibles, ses deuils. Les enjeux des traités de paix de 1919-1920 sont aussi abordés. Les impérialismes britannique et français au Proche-Orient sont aussi au coeur de cette histoire. L'auteure a réussi le coup de force d'aborder sérieusement autant de choses sans nous ennuyer, je suis admirative!
Ca y est, la prof d'histoire géo a fini son exposé! 😂
Pour l'histoire intime, le roman raconte comment Blanche décide de tout quitter, de sacrifier sa "première vie", soumise aux injonctions de son milieu et de la société de son temps, pour être elle-même, et vivre la seule vie qui peut la combler. Ce choix ne va pas sans de lourds sacrifices, dont le poids la hante à travers les années, bien qu'elle n'ait aucun regret. Elle préfère prendre le risque d'être une paria pour pouvoir vivre vraiment, ça me parle beaucoup en ce moment, et je pense que ça peut parler à beaucoup sur ce site!
J'essaie de ne pas trop divulguer d'éléments de l'histoire, mais j'espère quand même vous avoir donné envie de lire ce très beau livre...
Au plaisir de vous lire, et de découvrir de beaux livres grâce à vous tou-te-s
Claire
Merci pour l'idée 🤓 Comme lecture qui recrée une époque, je ne crois pas avoir trouvé mieux que la série "Fortune de France" de Robert Merle, une saga autour d'une famille protestante au temps des guerres de religion, magnifiquement écrite, captivante, érudite sans jamais être rasoir, non dénuée d'humour. (C'était au temps où je lisais beaucoup.... soupir)
Aah, Robert Merle! J'ai dévoré plein de livres de lui. Les hommes protégés est un roman d'anticipation qui est aussi, un peu, un questionnement sur le genre et la monogamie, ainsi que sur le patriarcat par effet de miroir. C'est comme ça que je l'avais ressenti à l'époque, mais entretemps, je me suis aussi rendue compte que les femmes étaient relativement absentes de ses intrigues, sauf dans Les hommes protégés, justement, mais elles sont présentées de façon un peu monolithique, les questions existentielles restant l'apanage des hommes, en général. Ca gâche un peu ma vision de son oeuvre, alors que j'adore son écriture et ses idées d'intrigue.
Quand j'étais enfant, mon père a lu Fortune de France, et m'en a dit beaucoup de bien, mais la quantité de lecture m'avait fait un peu peur! 😵
Merci de m'avoir rappelé de beaux souvenirs de lecture, qui ne me rajeunissent pas! 🙂
"La mort est mon métier " était magistral aussi...
Oui, terrible et dérangeant, sur la "banalité du mal" (Hannah Arendt... 😍 ). Superbement bien écrit, le début du livre met aussi très bien en avant toute la masculinité toxique qui a émergé de la Première guerre mondiale, à travers la "fraternité du front", et ses liens, via les corps francs, avec les organisations paramilitaires des nazis. Une façon moins rébarbative que les ouvrages académiques pour comprendre tout ça (désolée, chuis prof d'histoire géo, ça se voit un peu???). C'est moins rébarbatif, mais l'ambiance décrite dans le livre est étouffante, quand même...
Heureusement qu'il existe une multitude de supports littéraires et cinématographiques de grande qualité pour transmettre les messages de l'histoire. (Euh pour ton métier je n'y aurais pas pensé d'emblée)