Marvin ou la belle éducation est l’adaptation du livre En finir avec Eddy Bellegueule. Personnellement, le livre m’avait touché malgré un style d’écriture que je n’avais pas trouvé formidable, mais dans ce genre de livre, c’est le contenu qui importe. C’est le récit de la jeunesse de l’auteur, de l’enfance au début de l’âge adulte ; il y raconte les difficultés et brimades subies dans un milieu pauvre et intolérant. Il y a quelques modifications : par exemple, au lieu de Eddy qui devient Édouard, c’est Martin qui devient Marvin (Gay[e]), Bellegueule a été remplacé par Bijou et Louis par Clément. Pour le reste, il faudra voir le film… Il sort le 22 novembre.
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Ancien membre 29/10/2017 à 16:22
Personnellement je ne me suis pas ennuyé dans le livre. Le style ne me séduit pas mais il est facile à lire, et s'il s'agit d'un témoignage il est intessant ainsi que la façon dont il a été lu. Ce qui interpelle dans ce roman auto-biographique, c'est qu'il y a presque autant de violence morale dans le reniement par le personnage du nom dont il a hérité, de sa famille qui l'a élevé, de son village qui l'a hébergé, et de sa région qui l'a éduqué, que de violence morale qu'il a vécu et ressenti dans son enfance et humiliations physiques à l'école. A tel point que dans les journaux picards de l'époque où se passe l'action on lisait l'incompréhention de la famille de l'auteur qui ne se reconnaissait pas dans les personnages, disait l'avoir aimé et élevé comme tous les enfants, sa soeur avoir été fière de sa réussite et ne pas comprendre qu'ils n'existent plus pour lui, ses enseignants avoir mis beaucoup d'espoirs en lui. On est bien placé pour savoir que l'homophobie existe, se traduit plus souvent par la dépression du désespoir que par la force de réussir, et presque toujours par la fuite vers des cieux plus cléments. Et il est assez vraisemblable que dans les familles modestes et écoles de ces régions défavorisées l'intolérance à la difference et à l'excellence soit forte. Reste que dans ce roman la revanche sur la médiocrité et l'homophobie est implacable. Les intellectuels l'ont trouvé remarquable, ainsi que son style, et les picards n'ont rien compris. Ce sera interessant de voir le regard d'un réalisateur sur ce témoignage de notre époque. On verra si les vosgiens comprennent mieux puisque c'est le lieu de tournage du film.
Ancien membre 29/10/2017 à 16:33
Mes vosgiens à moi (rès secondaire à l'époque) m'ont accueillis moi et mon ami (de l'époque aussi) de façon exceptionnelle, sans arrière-pensée, et toujours avec une gentillesse inaltérable. On a papoté des heures durant, nous sommes rendus service, et je trouvais régulièrement devant la porte salades, tartes, compotes et autres jus de fruits maison. Au contraire de l'habituelle intolérable arrivée de gens "comme nous", ils nous en ont plutôt voulus d'être partis. Oui ils avaient des préjugés, mais davantage sur les parisiens qui débarquent dans un village d'une centaine d’âme que de par notre couple sans doute atypique pour eux.
Ancien membre 30/10/2017 à 18:44
J'ai beaucoup aimé le livre. Forcément, il parle de moi. Ce bouquin j'aurais pu l'inspirer. Je n'ai évidemment pas les qualités d'auteur d'Edouard Louis. Mais nous avons une enfance et une adolescence proche. La grande différence c'est que moi je suis né un monde réputé magnifique, idyllique, superbe. Je suis né en Anjou (l'hinterland d'Angers ; région hyper-primé comme lieu idéal). Il y a donc très très peu de gens qui acceptent d'entendre qu'on peut aussi y souffrir et même sacrément y souffrir. Mes frangines ne peuvent pas l'entendre, pour ma famille c'est tabou, indicible. Même mes amis d'enfance qui m'ont pourtant vu me faire maltraiter refuse de dire que c'était de la violence. Il m'a fallu des années (et des thérapeutes) pour que moi-même j'accepte de dire que cela était une violence. Et pourtant à 18 ans, j'ai été mis sous anti-dépresseurs... La cécité peut être considérable. Je ne me suis vraiment construit qu'en habitant loin (350 km) de chez mes parents une personnalité plutôt altruiste. Je me rappelle qu'à l'époque les Bourgeois de Paris (ou de Lyon) avaient taxé Edouard Louis de mensonges, que ça n'existait plus des territoires aussi arriérés. Et pourtant... Le paradoxe final c'est que c'est ma grande sœur qui m'a offert ce livre. Elle n'avait pas du tout pris conscience qu'elle m'offrait la vérité de mon enfance qu'elle refuse de voir.
Ancien membre 30/10/2017 à 21:26
Hello à tous ! J'ai pas eu l'occasion de finir le livre pour être franc... C'est en voyant le sujet sur le forum que j'ai cliqué et que j'y ai repensé, j'avais eu le livre en mains propre et dédicassé par l'auteur lui même lors d'une après midi rencontre avec l'association le refuge^^ Je ne savais pas qu'il serai un jours adaptée au cinéma... Du coup bin merci à vous car j'aime beaucoup lire le livre et ensuite voir le film...^^ Me prenez pas pour un fou :p
Ancien membre 31/10/2017 à 19:20
Pour en rajouter à ta folie Kyoukin ce livre était en lice pour le prix Goncourt. Donc c'est un sacré cadeau qu'on t'a fait ! Lis, finis le donc.
Ancien membre 31/10/2017 à 21:44
Damien93 Ah ! Merde alors x) Bin merci pour l'info ! Effectivement je fini le dernier Polar de Paula Hawkins et je vais me replonger dans Eddy Bellegueule alors...
Ancien membre 31/10/2017 à 22:32
Les parents qui sont pourtant habituellement vigilents sont aussi souvent aveugles aux vraies risques pour leurs enfants, les derniers prévenus en cas de problèmes sérieux, les médecins sont ceux qui soignent le plus mal leurs propres enfants, le coordonniers sont les plus mal chaussés dit le dicton. Il y a des raisons à cela, mais toujours est-il que cela se vérifie souvent.
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Ancien membre 01/11/2017 à 02:14
Citation de Ivysaur[quote cite=] Ce n est pas une adaptation du roman d Edouard Louis. [url=] Techniquement si, il n'assume juste pas l'objet final et a demandé d'être retiré du générique. Comme beaucoup d' auteurs condescendants, il vend des droits d'adaptation mais n'assume pas que son œuvre lui échappe, paradoxal. Ca ne m'étonne pas vraiment du personnage je l'ai toujours trouvé drama-queen sur les bords.
Ancien membre 01/11/2017 à 10:34
C'est inspiré, mais ce n'est pas adapté.
Ancien membre 03/11/2017 à 22:38
Je ne sais pas sur quoi tu t'appuies Tarek pour dire d'Edouard Louis qu'il est "drama-queen". Je l'ai moi-même rencontré dans les rues à Paris. Il n'avait rien à voir avec les Reines du Marais qui pavanent comme si elles étaient toute copines avec Jean-Paul (Gauthier), Karl (Lagarfeld) ou Arielle (Dombasle). C'est un bourgeois on ne peut plus tapisserie dans le Paris Intellectuel Rive Droite. Il ne court ni les plateaux-télé ni les émissions de radio.
Ancien membre 04/11/2017 à 00:05
Attention par "drama queen" j'entends qu'il a un certain goût pour la polémique, le théâtral. Rien que ses titres de romans mettent la puce à l'oreille. Moi personnellement je n'ai pas eu la chance de le rencontrer en ballade dominicale dans le 6ème mais je l'ai vu partout dans la presse/tv au moment de "l'affaire" qui a porté son nom. Tu pouvais le voir rédiger des pamphlets sur les journalistes qui osaient ne pas aller dans son sens. (Tu peux encore en trouver certains sur Twitter si tu creuses un peu). Je l'ai d'ailleurs vu à plusieurs reprises frôler la diffamation sur les réseaux sociaux notamment en parlant encore une fois d'un journalo qui a osé s'entretenir avec "Reda", personnage qu'il a pourtant lui même publicisé et parfois glorifié dans son roman. Alors quand j'entends qu'il renie maintenant une œuvre cinématographique qui lui rend un certain hommage et lui a rapporté un petit pactole en droits d'auteur, qu'il refuse la réinterprétation d'un objet qu'il a lui-même cédé, je me dit que j'ai au moins un peu raison sur ce personnage controverse.
Ancien membre 04/11/2017 à 00:14
Je ne le connais pas, mais c'est vrai qu'il donne l'impression d'être devenu dur avec le bétail, comme on dit.
Ancien membre 22/11/2017 à 19:23
Le film est sorti aujourd'hui, des retours?
Ancien membre 24/11/2017 à 16:55
Veni, vidi... Donc j’ai vu cette belle éducation. Contrairement à certains critiques qui préfèrent le livre et l’évocation de nos misérables campagnes et leurs parents indignes, personnellement j’ai trouvé le film plus abouti, plus mature que le livre. Le film n'arrête pas le scénario en s’inspirant du livre d’Édouard Louis, à savoir l'exfiltration par l'excellence d’un ado hors du harcèlement et de l'homophobie scolaire ordinaires, d’une sphère familiale incapable de le protéger et qui l’enfonce plus par incompréhension que par méchanceté, aggravés par un milieu défavorisé au RSA ou sévit alcoolisme et désœuvrement. La réalisatrice y ajoute sa touche personnelle de cours de théatre salvateurs de l’adversité, insertifs dans la sphère artistique, et initiatiques du milieu gay. Tout au long du film la réalisatrice renoue patiemment par des flash back les fils entre une enfance meurtrie et une vie de jeune gay, autant semée d’embûches affectives mais aussi ponctuée d'adultes bienveillants, et débouchant (très) lentement sur un avenir. Puis elle va chercher ce qu’il y a de meilleur dans les personnages qui ont inconsciemment contribué à lui pourrir la vie. Il en résulte un film dérangeant certes, mais qui à la fin ne laisse pas le goût amer du livre. Dérangeant pour les hétéros bien-pensants, enseignants, parents et bigots, mais apprenant rien aux gays : tout est vrai dans ce film, malheureusement. Tout est conforme aux difficultés que les gays ont pu peu ou prou rencontré chez nous en France avant d’être autonomes à l’âge adulte, le film nous épargne même les tentatives de suicide ou le rejet à la rue le jour anniversaire des 18 ans, se bornant à évoquer les idées de mort. L’homophobie des banlieues ou religieuse n’ont rien à apprendre de celle des campagnes, ce pourrait même être l’inverse. Mais un jeune gay hypersensible et doué se retrouvant dans les circonstances du film ne peut qu’être harcelé, exclu, en souffrir énormément puis devenir durablement anxieux et dépressif. Paradoxalement ce parcours initiatique douloureux, qui donne si mauvaise mine à Marvin jeune adulte que sur un forum gay on lui conseillerait volontiers d’aller voir un médecin, est par moment drôle tant ce qu’il découvre peut être ordinaire dans le monde si peu bisounours de la gayitude. Je pense par exemple aux «chats» du bellâtre quinquagénaire qui drague à la jaguar, que la réalisatrice humanise un peu, mais dont la vie et celle de ses «chats» est peu enviable. Le film peut parfois apparaître un peu laborieux, mais une reconstruction c'est long, et les acteurs sont bons dans ces rôles difficiles. Notamment Marvin timide jeune adulte qui se (re)construit, son père mal dégrossi (un peu trop selon les critiques apparemment), mais aussi Marvin enfant tenu par un acteur lumineux qui a du jouer le role de môme harcelé et quasi abusé sexuellement. Ils sont attachants sans être pathétiques au point de nécessiter plusieurs paquets de mouchoirs. Un bon film à voir qui devrait donner à réfléchir aux parents bien pensants tenant à donner une belle éducation à leurs enfants, ou à les élever tant bien que mal dans un monde économique difficile. Sauf que ces parents là n’iront certainement pas le voir... A voir à mon avis pour un (jeune ou moins jeune) gay qui se respecte ^^ [img]]
Ancien membre 24/11/2017 à 18:33
J'ai moi-même vu le film, sans avoir lu les livres qui ont servi d'inspiration (il n'y a pas qu'Eddy Bellegueule mais aussi Retour à Reims). Je l'ai trouvé très bon, l'histoire est très sympathique à suivre, avec deux histoires entrelacées qui racontent deux époques d'un même personnage, agencées dans un ordre qui semble parfois un peu aléatoire. Je recommande vivement. Je ne suis pas d'accord, Lindos, quand tu dis que le film nous épargne les tentatives de suicide. Pour moi la scène sur les rails en est une, sauf qu'il choisit de renoncer et de simplement regarder passer le train. De même pour le "quasi abusé sexuellement", j'y vois plutôt clairement une scène de viol, interrompue parce que des gens s'approchaient.
Ancien membre 24/11/2017 à 19:39
"Pour moi la scène sur les rails en est une, sauf qu'il choisit de renoncer et de simplement regarder passer le train." J'ai appelé cela idées de mort, sans doute un peu au-dessous de la réalité, j'aurais peut-être du dire quasi TS. Chez les très jeunes les TS sont généralement sans retour car ce sont des pulsions mortelles, chez les ados plus âgés elles conduisent heureusement plus souvent à l’hôpital sinon cela serait une hécatombe. "De même pour le "quasi abusé sexuellement", j'y vois plutôt clairement une scène de viol, interrompue parce que des gens s'approchaient." J'aurais pu dire quasi viol puisque ces agresseurs évoquaient une fellation autrement dit une pénétration. Toutefois deux choses. Le jeune acteur le joue d'ailleurs très bien, même si ses agresseurs sont largement plus matures physiquement que lui, le jeune Marvin est dans l’ambiguïté entre le désir frustré du masculin et la peur du harcèlement sexuel, de l’humiliation, de la violence, de l'abus, ou tout simplement de l'inconnu qu'il ne peut maitriser et consentir librement. C'est généralement très culpabilisant pour les victimes, et intuitivement compris par les agresseurs qui en profitent sans grand risque. La seconde chose est que par défaut d'éducation, généralement ordinaire aux collèges et non pas réservé aux campagnes profondes, ces jeunes savent bien qu'ils sont dans l'interdit et qu'ils n'aimeraient pas qu'on leur fasse ce qu'ils font au petit bouc émissaire, mais sont totalement incapables d'en mesurer la gravité, et d'évaluer qu'ils mettent leur avenir en jeux, l'impunité leur semble assurée. Ce qui a pour conséquence que si d'aventure cela se termine en justice, ce qui arrive rarement ou très longtemps après les faits, ils seront totalement incapables d'expliquer pourquoi ils l'ont fait, et pourquoi aucun principe ne les a arrêté. Les "délires" collectifs des grands enfants et jeunes ados peuvent même conduire à la mort, la leur autant que celle de leur bouc-émissaire. La société se rassure en affirmant hypocritement que nul n'est sensé ignorer la loi, mais le fait est que les enfants l'ignorent et que les adultes sont sensés les éduquer et surveiller. Rien à voir avec ta remarque (fort judicieuse), une interview des Marvin : https://www.youtube.com/watch?v=65hQkPRphKM
Ancien membre 29/11/2017 à 00:08
Alors oui le film est très clairement une adaptation du livre d’Édouard Louis avec dans les deux objets artistiques une échappée de son contexte familial par l'intégration de la section théâtre du lycée. Là où les deux divergent, c'est que Marvin interroge son enfance par un spectacle de théâtre que tout Paris encense quand Édouard Louis l'a fait par la littérature et son livre "En finir avec Eddy Bellegueule" dont il fut fait grand cas à sa sortie. Ce que permet le film également, c'est de raconter la suite, c'est à dire comment par les rencontres avec des figures du milieu artistique et/ou homosexuel, Marvin jeune homme se construit dans un tiraillement entre ses origines et le milieu culturel parisien auquel il s'intègre de façon assez fulgurante. Au final, plus qu'une adaptation du livre d’Édouard Louis "En finir avec Eddy Bellegueule", on a là un biopic sur l'enfance d'Eddy Bellegueule et les premiers pas d’Édouard Bellegueule, son nouveau patronyme, dans le personnage d’Édouard Louis, son pseudonyme littéraire - suis-je clair ? - ce qui est finalement bien plus intéressant. Et connaissant les soubresauts qu'a déclenché la publication de son second livre "Histoire de la violence", un deuxième film pourrait très bien poursuivre le travail de fictionnalisation complet d’Édouard Louis en Martin Clément... le nouveau nom de Marvin Bijou - c'est qui celui-là ? - mais si tu sais bien...
Ancien membre 29/11/2017 à 13:24
Oaime, "Et connaissant les soubresauts qu'a déclenché la publication de son second livre "Histoire de la violence", un deuxième film pourrait très bien poursuivre le travail de fictionnalisation complet d’Édouard Louis en Martin Clément... le nouveau nom de Marvin Bijou - c'est qui celui-là ? - mais si tu sais bien... " Je n'ai pas lu le livre, mais apparemment tu pourrais avoir raison et je devrais le lire. Je viens juste de lire le thème de ce livre. Il faut savoir que cette violence est encore plus intense à l'étranger, mais en France elle n'est pas rare notamment autour de la prostitution et des migrants. Personnellement je crois comme dans le film qu'on peut briser le cycle des harcèlements et violences sexuelles, et j'attendrais d'un nouveau film la même chose dans le scénario de celui-ci, non pas par déni mais par solution.
Ancien membre 29/11/2017 à 23:16
C’est un film à voir, en tous cas. La réalisatrice a su réinterpréter l’histoire d’origine et y mettre sa touche personnelle, et le résultat me semble plutôt convainquant.