Peur et résistance : un regard sur la vie des militants LGBTQ+ en Chine
Publié le 16/01/2024 à 09:35 - Édité le 16/01/2024 à 09:44De la pression familiale à l'oppression étatique: l'histoire de deux militantes
L'été dernier, Mei, une femme transgenre vivant dans le sud de la Chine, a reçu un message de sa complice dans la lutte pour la cause LGBTQ+, Ying. Suite à l'acceptation tardive de sa famille à la laisser poursuivre ses études, Ying avait enfin pu échapper à neuf mois d'emprisonnement familial. Elle souhaitait maintenant fuir sa propre famille pour retrouver sa petite amie dans une autre ville.
Ensemble, Mei et Ying ont élaboré un plan. Mei prendrait le téléphone de Ying, pour prévenir sa famille de la perte de la localisation de leur fille et tenterait de les convaincre de ne pas faire appel aux forces de l'ordre. Cependant, après un mois d'échecs de médiation, la famille a signalé la situation à la police qui a retrouvé la trace du téléphone chez Mei. Elle a alors été accusée d'enlèvement et emmenée pour un interrogatoire de dix heures.
La communauté LGBTQ+ en Chine, entre silence forcé et lutte pour la reconnaissance
Au quotidien, la communauté LGBTQ+ en Chine se retrouve prise en étau entre la persécution systématique de l'État et l'intolérance de la société. La difficulté pour un individu de s'identifier puis de survivre en tant que personne queer en Chine est exacerbée par le fait que même à l'âge adulte, la conception systémique du pays empêche l'évasion ou l'assistance extérieure.
Cette réalité est illustrée par le sort réservé au mouvement LGBTQ+ par le Parti communiste chinois. Les autorités chinoises ont été assez actives pour museler la communauté. En effet, une organisation de défense des droits des personnes LGBTQ+ a été contrainte de fermer ses portes pour des raisons "inévitables" en mai 2023. Par ailleurs, les comptes de réseaux sociaux des groupes LGBTQ+ universitaires ont été supprimés sans préavis, l'événement annuel Shanghai Pride a cessé d'exister en 2020, et l'interdiction de mariage et d'adoption pour les couples de même sexe perdure.
De plus, des complications juridiques ajoutent une couche d'obstacles, en particulier pour les personnes transgenres et non conformes. Malgré la décriminalisation de l'homosexualité en 1997, suivi de son retrait de la liste des maladies mentales en 2001, les critères stricts pour le changement de genre (être âgé de plus de 18 ans, célibataire, avoir le consentement parental et un casier judiciaire vierge) demeurent un frein majeur à l'épanouissement de ces personnes.
Pour couronner le tout, le système juridique de la Chine ne fournit aucune protection explicite contre la discrimination fondée sur l'identité de genre ou l'orientation sexuelle. Même si une loi existe contre la violence domestique, celle-ci demeure insuffisante pour protéger les victimes de cette communauté, les crimes étant souvent relégués à la catégorie des affaires familiales.
Dans ce climat, les militantes et militants LGBTQ+ en Chine paient parfois un lourd tribut dans leur quête pour l'égalité des droits, comme en témoignent les cas de Mei et Ying. Leurs histoires sont le reflet d'une societé sclérosée et répressive, et leur courage est le symbole d'un combat essentiel pour la justice sociale.
Source : theguardian
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