Jeu écrire à quatre mains - Ezeckiel/Tabasko

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Ancien membre
06/04/2018 à 23:06

Léa et Zack ne pouvaient pas cuisiner épicé, car ils avaient des enfants. Ils ne sortaient plus en discothèque, ne gémissaient plus pendant leurs ébats sexuels, car ils avaient des enfants. Léa et Zack ne disaient pas "putain de merde" et ne voyaient plus leurs amis, ils avaient revendu leur moto, car ils avaient des enfants. Léa et Zack avaient des enfants comme on a un cancer.

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Ancien membre
07/04/2018 à 09:12

C'est quoi, votre concept ?

(Haha, ça oui, avoir des enfants, ça change tout, c'est la ***** !)

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Nina82
07/04/2018 à 10:31

Totalement d'accord ! C'est pour ça que je suis heureuse d'être stérile, mais un peu moins d'avoir la ménopause x)

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Ancien membre
07/04/2018 à 12:22

Pourtant, ils l'avaient voulu, leur cancer. La vieille Nicole, voisine des parents de Léa qui, par la force des choses - c'est-à-dire du temps et de la solitude -, était devenue leur amie, avait bien eu le temps d'observer les tourtereaux. Endimanchés les jours de visite, ils avaient l'allure de jeunes [i]tradis[/i] et le discours assorti. En tout point, Léa et Zack étaient semblables à des enfants sages, pas encore tout à fait mature qui, au lieu de sortir des sentiers battus, avaient consenti à devenir leurs parents... La bienséance et l'expérience de la politique à table avaient voulu que la vieille Nicole, soixante-huitarde qui n'avait pas perdu la flamme, souriait l'air entendu à toutes les thèses soutenues, même si elle les vomissait trois fois. Les vieux protégeaient leurs acquis et les jeunots n'y connaissaient rien mais ne se privaient pas de marquer leur soutien à des figures droitières bien résolues à ne jamais défendre les intérêts de leur génération. La vie leur apprendrait, se disait-elle... et la vieille Nicole avait raison. Le moment vint de se confronter à la vie lorsqu'elle leur offrit l'incarnation la plus au point de ce qu'elle était : des gosses. La vie, compliquée comme des gosses. Contraignante comme des gosses. Joyeuse et dramatique sans qu'on sache très bien à quel moment et le bien-être, comme le repos, ne venant que lorsqu'ils sont endormi. Et comme si la Nicole et la vie avaient été de mèche, cette dernière leur en flanqua deux d'un coup. Des jumeaux dizygotes. Que la poésie bourgeoise de Léa avaient nommés Ariane et Côme. Très joli. Cela ferait, pour sur, magnifiquement contraste avec le nom de leur père dont l'origine sociale, modeste, n'avait pas oublié de se marquer indélébilement. Zack, pour se faire aimer de la Léa, avait renié tout l'habitus de sa classe et, dans le secret de l'isoloir, trouvait désormais une étrange fierté à donner sa voix au Capital. Ce serait donc Ariane et Côme Manouvrier. Ça sonnait moins la harpe que l’accordéon.

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Nina82
07/04/2018 à 17:38

Jolies tournures de phrase ! J'ai hâte de lire la chute ! ^^

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Ancien membre
07/04/2018 à 17:56

Zack n’avait pas toujours abdiqué et dans une trace de poudre, sur l’îlot central de sa cuisine moderne à 3h du matin, il tentait une résurrection vaine. Cela faisait deux mois qu’il avait rechuté. Léa l’ignorait, d’ailleurs elle n’avait jamais su son imposture. Il jouait bien son rôle schizophrène, dans le théâtre qu’était leur appartement grand standing du 16ème, à Paris. Sans embûche, il avait suivi le plan durant des années, empoigné son être pour le saccager. Il s’était fait sculpture d’argile et sculpteur à la fois. Aujourd’hui, il n’en résultait guère plus qu’un vulgaire tas de pâte à modeler difforme. Zack se détestait dans ses costumes Armani. Surtout depuis qu’il avait croisé Rachel, par hasard au marché de Rungis, à l’automne. Rachel, la belle gitane de l’université, la lanceuse de pavés. Celle qui rédigeait des pamphlets assassins à l’encontre de l’Impérialisme. Rachel et sa déchéance qui l’attirait autant qu’elle l’attristait, dans les soirées beuverie où les murs des bars de la ville la maintenaient debout. Rachel qui taxait des clopes aux passants pour se rouler des joints, Rachel que les mecs désiraient, qui restait imprenable, libre. Une goutte de sang écarlate s’est écrasée au sol, sur le carrelage blanc de la cuisine. Zack porte le dos de sa main sous ses narines et se précipite dans la salle de bain. Il nettoie son visage puis le cherche à travers le miroir ; celui de ses vingt ans. Il voudrait que repousse sa barbe hirsute ou celle de trois jours qu’il rasait mal. Qu’a-t-il fait des petites boules d’acier ? Les piercings qu’il portait à la langue, l’arcade sourcilière et le creux du menton. De sa jeunesse, il n’a gardé que son crâne rasé. Non par nostalgie mais parce que chevelu, il se trouvait vilain. Léa validait son avis, une fois n’est pas coutume. Il l’avait rencontré, il l’avait trouvé belle et voilà ce qu’il était devenu, comme beaucoup : il avait crié mort aux vaches une dernière fois, avant de finir lui-même à l’abattoir.

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Nina82
07/04/2018 à 18:46

Poésie sublime, très imagée. Parfaitement ironique ...

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Nina82
07/04/2018 à 18:46

Poésie sublime, très imagée. Parfaitement ironique ...

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Ancien membre
07/04/2018 à 21:59

Cependant, ce n'était pas tout à fait sa mort. Il avait changé, s'était troqué pour un homme rangé et suffoquait parfois dans la forme étroite de sa nouvelle figure mais Zack ne haïssait pas sa condition. Il peinait dans la contrevérité qu'il avait fait de lui-même mais poursuivait la farce. Ses petits luxes de prolétaire embourgeoisé lui servait de pansements. D'ailleurs, n'aurait-il pas pu se payer ses petites fuites chimiques si sa sécurité financière, assurée, de-ci, par un beau-père argenté soucieux du confort de sa seule fille et de-là, par les salaires convenables des tourtereaux, n'était pas solide assez pour qu'il puisse s'autoriser l'excès. De son jeune temps, ce n'était pas à la colombienne qu'il s'extirpait du monde : il n'aurait pas pu. Puis ne le faisait-il pas pour les mêmes raisons... A l'époque, il se faisait planer au shit des banlieues, coupée au canif dans des tours. Et parfois, avec Rachel, pour le plaisir simple de se détacher. De voir la société de plus haut, tandis qu'entre deux inhalations, elle se demandait, à haute voix et le regard tendre, si aimer Max Weber c'était se foutre du monde ou être plus réaliste. "La belle époque", pour lui, ce n'était résolument pas [i]La Belle Otero[/i] et l'exposition universelle... C'était celle où il n'avait pas l'impression d'avoir construit sur du vide. Quelque chose se mit à vibrer dans poche. Le bruissement de quelque chose. C'était son téléphone et il venait de recevoir un message.

"En tout cas, mon pote, dans ton petit costard de vendu, j'ai eu envie de te griffer. Sois bobo, à la limite, mais pas BCBG, putain. On aurait dit le fils à François Fillon, tu sens le putain de MEDEF. J'sais pas ce que tu fous..."

C'était Rachel. Ils s'étaient croisés, oui et il s'était bien privé d'en dire mot à Léa.

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Ancien membre
20/04/2018 à 22:03

Partie, Ezeckiel ? :(

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Ancien membre
14/07/2018 à 06:12

C'était très beau



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